Dans la r¨¦gion d'Abiye, coinc¨¦e entre le Soudan et le Soudan du Sud, la crise humanitaire continue de s'aggraver.

Dans cet entretien, Alexis Huliro Bisanukuri, chef du sous-bureau d¡¯OCHA, explique comment, en l'absence de gouvernance claire, face ¨¤ l'augmentation des d¨¦placements et ¨¤ la diminution de l'aide, les civils sont livr¨¦s ¨¤ eux-m¨ºmes, face ¨¤ un avenir marqu¨¦ par les conflits, les chocs climatiques et les promesses non tenues.

En juillet 2011, le Soudan du Sud a officiellement obtenu son ind¨¦pendance du Soudan, et Abiye est rest¨¦e une r¨¦gion disput¨¦e. Comment OCHA s'est-il adapt¨¦ ¨¤ cette situation??

Apr¨¨s l'accord de 2011 entre le Soudan et le Mouvement populaire de lib¨¦ration du Soudan (MPLS), un cadre a ¨¦t¨¦ ¨¦tabli pour l'administration d'Abiye, en attendant un r¨¦f¨¦rendum qui n'a jamais eu lieu.

Depuis lors, la Force int¨¦rimaire de s¨¦curit¨¦ des Nations Unies pour Abiye (FISNUA) a ¨¦t¨¦ d¨¦ploy¨¦e pour maintenir la s¨¦curit¨¦ et soutenir les efforts humanitaires.

OCHA a ¨¦tabli un bureau auxiliaire ¨¤ Abiye pour assurer la coordination entre les ¨¦quipes humanitaires au Soudan et au Soudan du Sud, assurer la liaison avec la FISNUA et plaider en faveur de l'aide par le biais d'analyses factuelles.

Quels sont les principaux d¨¦fis auxquels vous ¨ºtes confront¨¦s ¨¤ Abiye ?

La situation est extr¨ºmement complexe. Les violences intercommunautaires, les tensions ethniques et les conflits fonciers sont fr¨¦quents. Les catastrophes climatiques, comme les inondations, les ¨¦pid¨¦mies et l'ins¨¦curit¨¦ alimentaire, ont aggrav¨¦ la situation.

De nombreux agriculteurs ont abandonn¨¦ leurs terres en raison des d¨¦placements r¨¦p¨¦t¨¦s et des pertes de r¨¦coltes. Le conflit soudanais s'est ¨¦tendu ¨¤ Abiye, et la pr¨¦sence des Rapid Support Forces (RSF) dans le nord repr¨¦sente de nouvelles menaces, telle une ¨¦p¨¦e de Damocl¨¨s au-dessus de la t¨ºte des populations.

Par ailleurs, les ressources humanitaires sont mises ¨¤ rude ¨¦preuve. ? titre indicatif, il n'y a qu'un m¨¦decin pour 70?000 personnes et environ 16?000 enfants ne sont pas scolaris¨¦s.

Comment voyez-vous ¨¦voluer le paysage humanitaire ?

Malheureusement, la population perd espoir. L'absence de gouvernance, la violence persistante et la d¨¦t¨¦rioration des infrastructures ont conduit ¨¤ ce que beaucoup appellent un ??d¨¦veloppement ¨¤ l'envers??.

Les besoins humanitaires augmentent, mais la lassitude des donateurs s'installe. OCHA s'efforce de s'adapter en revoyant ses strat¨¦gies de coordination et en mobilisant directement les communaut¨¦s pour hi¨¦rarchiser les besoins. Pourtant, sans gouvernement op¨¦rationnel, l'aide humanitaire reste la seule bou¨¦e de sauvetage.

Abiye poss¨¨de des ressources p¨¦troli¨¨res. Quel impact cela a-t-il sur la situation??

C'est un facteur majeur. Ni le Soudan ni le Soudan du Sud ne souhaitent abandonner le contr?le d'Abiye en raison de sa valeur ¨¦conomique.

Cela a cr¨¦¨¦ un statu quo qui profite aux deux gouvernements, mais emp¨ºche tout progr¨¨s r¨¦el ou toute r¨¦solution.

Que faut-il pour am¨¦liorer la situation ?

? court terme, nous devons prot¨¦ger les civils et n¨¦gocier l'acc¨¨s avec les groupes arm¨¦s.

? long terme, la seule solution durable r¨¦side dans la paix et une r¨¦solution claire du statut d'Abiye.

D'ici l¨¤, l'aide humanitaire restera la seule bou¨¦e de sauvetage pour la population.